Newsletter N°2 – Avril-Mai 2024
Jurisprudence :
- Horaire collectif —
- Engagements unilatéraux et fusion-absorption —
- Accord de substitution et date d’application —
- Cessation de l’engagement unilatéral à durée déterminée —
- Accord de prévoyance et dénonciation —
- Activités sociales et cultures du CSE —
- PSE et obligation individuelle de reclassement —
- Licenciement économique et obligation de reclassement dans un groupe —
- Pouvoir du signataire et PSE —
- Pouvoir du signataire et demande d’autorisation de licencier —
- Plan de départ volontaire et salarié protégé —
- Sauvegarde de la compétitivité —
- Refus d’un changement d’horaire —
- Requalification d’un CDD en CDI —
- Requalification d’un contrat d’intérim —
- Contrat à temps partiel et durée minimum de travail —
- Contrat à temps partiel et portée des mentions obligatoires —
- Expatriation et épargne salariale —
- Frais exposés par le télétravailleur —
- Droit de retrait et retenue sur salaire —
- Propos racistes et vie professionnelle —
- Prime et grève —
- Harcèlement moral —
- Pouvoir disciplinaire —
- Clause de forfait jours —
- Licenciement verbal —
- Motifs de la lettre de licenciement —
- Licenciement pour inaptitude et prescription —
- Plancher du barème Macron —
- Conciliation prud’homale et clause de non-concurrence —
- Salarié protégé et indemnité d’éviction —
Réglementation :
- La loi sur le partage de la valeur du 29 novembre 2023 —
- Mise à jour du BOSS du 19 avril 2024, entrée en vigueur le 1er mai 2024 —
- Question-réponse du Gouvernement relatif au partage de la valeur en cas d’augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal du 6 juin 2024 —
Jurisprudence
Horaire collectif. Cass. Soc., 7 mai 2024, n°22-23.032 :
A défaut d’accord collectif, l’horaire collectif peut être modifié unilatéralement par l’employeur à condition de consulter préalablement le CSE, de le transmettre à l’inspecteur du travail et de l’afficher dans les lieux concernés. Toutefois, même non soumis au CSE (ni communiqué à l’inspecteur), le nouvel horaire collectif modifié unilatéralement est opposable aux salariés.
Engagements unilatéraux et fusion-absorption. Cass. Soc. 22 mai 2024, n°22-14.984 :
L’entreprise absorbante, nouvel employeur, ne peut refuser aux salariés transférés le bénéfice des avantages collectifs instaurés par engagement unilatéral, au motif qu’ils détiennent des droits résultant i) d’un usage ou d’un engagement unilatéral en vigueur dans l’entreprise d’origine au jour du transfert, ou ii) d’avantages individuels acquis.
Accord de substitution et date d’application. Cass. Soc. 15 mai 2024, n°22-17.195 :
L’accord de substitution négocié en vue d’harmoniser le statut collectif dans le cas d’une cession ou d’une fusion entre 2 entreprises, conclu postérieurement à cette opération, peut prévoir des dispositions d’application rétroactive, en l’espèce au jour de la mise en cause de la convention d’origine, dès lors que les salariés transférés ne sont pas privés des droits qu’ils tiennent de la loi ou du principe de l’égalité de traitement.
Cessation de l’engagement unilatéral à durée déterminée. Cass. soc. 3 avril 2024, n° 22-16937 :
Lorsqu’un employeur prend un engagement unilatéral à durée déterminée à l’égard de ses salariés, il n’est tenu à aucun formalisme pour y mettre fin. Cet engagement unilatéral cesse de s’appliquer au terme fixé par l’employeur, sans qu’il soit tenu de procéder à l’information des salariés concernés et des représentants du personnel.
Accord de prévoyance et dénonciation. Cass. Soc., 29 mai 2024, n°22-23.415 :
Une Décision unilatérale de l’employeur (DUE) ne permet pas de mettre un terme à un accord collectif sur les frais de santé. L’employeur devra respecter la procédure applicable à la dénonciation des accords collectifs à savoir, concernant un accord à durée indéterminée, une dénonciation notifiée à chacune des parties puis la notification de la dénonciation de l’accord à la DREETS et le respect d’un préavis de 3 mois.
Activités sociales et cultures du CSE. Cass. soc., 3 avril 2024, n° 22-16812 :
L’accès des salariés aux activités sociales et culturelles (ASC) du CSE ne peut pas être subordonné à une condition minimale d’ancienneté. Cet arrêt de principe retient une position contraire à celle de l’URSSAF, qui admet les conditions d’ancienneté, dans la limite de 6 mois.
PSE et obligation individuelle de reclassement. Cass. Soc. 15 mai 2024, n°22-20.650 :
L’employeur est tenu de faire aux salariés licenciés pour motif économique des propositions précises, concrètes et individualisées de reclassement de tous les postes disponibles correspondant à leur qualification, et ce même si le PSE comprenant une liste d’offres de reclassement, a été homologué. En effet, les salariés détiennent, en plus de leur droit au reclassement collectif et anonyme attaché au PSE, un droit individuel au reclassement opposable à l’employeur en cas d’insuffisance ou de défaut de reclassement.
Par ailleurs, l’employeur doit (i) rapporter les éléments permettant de vérifier le périmètre de reclassement qu’il a retenu au sein du Groupe au regard du critère de la permutabilité des salariés, et (ii) justifier l’envoi de courriers de recherches de reclassement aux entités du Groupe.
Licenciement économique et obligation de reclassement dans un groupe. Cass. soc., 29 mai 2024, n°22-15.565 et n°22-15.559 :
Les demandes adressées par l’employeur aux sociétés du groupe, afin de leur permettre d’apprécier si les emplois dont elles disposent sont adaptés aux compétences des salariés menacés de licenciement, doivent contenir un certain nombre de précisions : la nature du contrat de travail, l’intitulé des emplois supprimés, le statut et le coefficient de classification des salariés concernés. Dès lors, un courrier général et abstrait ne comportant aucune indication sur la nature de l’emploi et la classification du poste supprimé, n’est pas suffisamment précis, rendant le licenciement pour motif économique sans cause réelle et sérieuse.
Pouvoir du signataire et PSE. CE 3 avril 2024, n°465582
Lorsqu’un mandant, en l’espèce un Directeur général, n’a pas le pouvoir de signer un accord collectif valant PSE, il est possible de régulariser la situation a posteriori, avec la ratification, expresse ou tacite, de l’autorité habilitée. Cette régularisation peut s’effectuer même après la validation du PSE par l’administration.
Pouvoir du signataire et demande d’autorisation de licencier. CE 3 avril 2024, n° 470440 :
Lorsqu’une demande d’autorisation de licenciement a été présentée à l’inspection du travail par une personne n’ayant pas qualité pour agir, cette erreur peut être rectifiée au cours de l’instruction de la demande, avant que l’inspecteur du travail ne statue. À défaut, l’autorisation donnée ne permet pas le licenciement.
Plan de départ volontaire et salarié protégé. CE 3 avril 2024, n°469694 :
L’inspecteur du travail, saisi d’une demande d’autorisation d’un commun accord du contrat de travail d’un salarié protégé ayant adhéré à un plan de départ volontaire inclus dans un PSE, n’a pas à contrôler le bien-fondé du motif économique de la rupture.
Sauvegarde de la compétitivité. CE 3 avril 2024, n°471271 :
La sauvegarde de la compétitivité peut constituer un motif économique dans un secteur non marchand, à savoir pour une association à but non lucratif.
Refus d’un changement d’horaire. Cass. Soc. 29 mai 2024, n°22-21. 814 :
Un salarié peut légitimement refuser un changement d’horaire portant une atteinte excessive à sa vie personnelle, celui-ci étant incompatible avec ses obligations familiales impérieuses, en l’espèce, la charge d’un enfant lourdement handicapé. Le refus du salarié de passer d’un horaire de nuit à un horaire de jour, quand bien même les stipulations de son contrat de travail prévoyaient une telle éventualité, est donc légitime et ne peut justifier son licenciement.
Requalification d’un CDD en CDI. Cass. Soc. 22 mai 2024, n°22-11.623 :
La signature d’un CDD est une obligation d’ordre public dont l’omission entraîne sa requalification en CDI. Il en est toutefois différemment si l’employeur démontre que le salarié a refusé de signer le contrat (ou l’avenant de renouvellement), pour des raisons abusives, c’est-à-dire de mauvaise foi. Si le salarié a de justes raisons de refuser de signer le contrat ou son avenant, tels qu’en l’espèce, le souhait de renégocier certaines clauses d’un contrat, qui succédait à deux autres contrats avec l’entreprise, et qu’il continue de travailler dans l’attente de signer le contrat définitif, il peut demander sa requalification en CDI.
Requalification d’un contrat d’intérim. Cass. soc., 24 avril 2024, n°22-21818 :
Un intérimaire dont le contrat de travail est requalifié en CDI, puis dont la rupture est jugée nulle, ne peut obtenir cumulativement sa réintégration au sein de l’entreprise utilisatrice et une indemnisation par l’entreprise de travail temporaire. Comme pour tout salarié dont le licenciement est nul, l’intérimaire a une option : la réintégration ou l’indemnisation. La demande de réintégration auprès d’un employeur est exclusive de toute indemnisation par l’autre employeur.
Contrat à temps partiel et durée minimum de travail. Cass. Soc. 22 mai 2024, n°22-11.623 :
La seule conclusion d’un contrat d’une durée inférieure à 24 heures hebdomadaire n’entraîne pas sa requalification en contrat à temps complet.
Contrat à temps partiel et portée des mentions obligatoires. Cass. Soc. 22 mai 2024, n°23-13.306 :
L’absence de mention dans le contrat de travail des modalités selon lesquelles les horaires de travail sont communiqués par écrit au salarié, n’entraîne pas sa requalification à temps plein.
Expatriation et épargne salariale. Cass. Soc. 15 mai 2024, n°22-21.109 :
Un accord de participation ou d’intéressement ne peut valablement écarter les salariés de l’entreprise détachés ou expatriés, quelle que soit la durée de leur expatriation, du bénéfice des accords, peu importe qu’ils n’y exercent pas leur activité ou qu’ils n’y soient pas rémunérés. Par ailleurs, l’employeur français qui a maintenu en partie la rémunération en France sur la période d’expatriation, doit délivrer des bulletins de paie, nonobstant l’absence d’affiliation du salarié au régime général de Sécurité sociale.
Frais exposés par le télétravailleur. CA Paris, 3 avril 2024, n°21/07292 ; CA Versailles, 21 mars 2024, n°22/01810 :
La prise en charge par l’employeur des frais exposés par le télétravailleur fait débat : la Cour d’appel de Paris rejette la demande d’une salariée réclamant une indemnisation du fait de l’absence de prise en charge des frais liés à son télétravail, alors que la Cour d’appel de Versailles estime que la prise en charge de ces frais est obligatoire pour l’employeur. La Cour de cassation ne s’est pas encore prononcée sur cette question.
Droit de retrait et retenue sur salaire. Cass. Soc. 22 mai 2024, n°23-19.849 :
Lorsque les conditions d’exercice du droit de retrait ne sont pas réunies, le salarié s’expose à une retenue sur salaire, sans que l’employeur soit tenu de saisir préalablement les juges du bienfondé de l’exercice du droit de retrait.
Propos racistes et vie professionnelle. Cass. Soc. 15 mai 2024, n°22-16.287 :
Les propos racistes tenus à l’encontre d’un salarié par son supérieur hiérarchique au cours d’un dîner de Noël organisé par le CSE relèvent de la vie professionnelle et laissent supposer une discrimination du salarié en raison de ses origines.
Prime et grève. Cass. soc. 3 avril 2024, n° 22-23321 :
L’attribution à certains salariés non-grévistes d’une prime exceptionnelle, correspondant à un surcroît de travail ou à la réalisation de tâches en dehors de celles prévues par leur contrat de travail, ne constitue pas une mesure discriminatoire.
Harcèlement moral. Cass. soc., 3 avril 2024, n°23-11767 :
Saisi d’une demande de reconnaissance d’un harcèlement moral, le juge doit examiner l’ensemble des éléments de fait présentés par le salarié puis les apprécier globalement. Dès lors, il ne peut pas écarter certains éléments ni les apprécier séparément, pour considérer qu’il n’y a pas de harcèlement moral. Un courrier produit à l’instance sans même l’avoir examiné ne peut donc être écarté et les pièces médicales ne peuvent être analysées séparément des autres éléments de fait.
Pouvoir disciplinaire. Cass. Soc., 29 mai 2024, n°22-19.313 :
Dépassant la simple remarque orale, l’employeur qui adresse un courrier de mise en garde à un salarié lui reprochant des faits fautifs et demandant leur cessation, notifie une sanction qui épuise son pouvoir disciplinaire au regard des faits visés dans le courrier.
Clause de forfait jours. Cass. soc., 24 avril 2024, n°22-20539 :
En cas de contestation de la validité de la clause de forfait jours, le contrôle de la charge de travail porte sur l’effectivité des mesures de suivi de la charge de travail. Si l’employeur se prévaut du mécanisme de rattrapage prévu par l’article L. 3121-65 du code du travail, dans l’hypothèse d’un accord collectif insuffisant ou incomplet, ce mécanisme doit non seulement strictement répondre aux exigences de l’article précité, mais l’employeur doit en outre effectivement le mettre en oeuvre.
Licenciement verbal. Cass. soc., 3 avril 2024, n°23-10.931 :
L’employeur qui, le même jour, téléphone à un salarié pour lui annoncer qu’il est licencié et lui envoie sa notification de licenciement par LRAR, procède à un licenciement verbal. Un tel licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
Motifs de la lettre de licenciement. Cass. soc., 3 avril 2024, n°19-10.747 :
Une lettre de licenciement peut contenir différents motifs personnels de rupture, à la condition que chaque motif procède de faits distincts, et de respecter les règles de procédure applicable à chacun. Le juge doit, dans ce cas, vérifier le bien-fondé de chaque motif.
Licenciement pour inaptitude et prescription. Cass. soc., 24 avril 2024, n°22-19.401 :
L’action en contestation du licenciement pour inaptitude, visant à démontrer que l’inaptitude trouve son origine dans un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, doit être intentée dans le délai de 12 mois suivant la date de notification du licenciement, et non à compter de la date à laquelle le salarié eu connaissance des manquements de l’employeur.
Plancher du barème Macron. Cass. soc., 3 avril 2024, n° 23-13.452 :
L’indemnisation minimum prévue par le barème Macron doit être impérativement respectée. Le salarié peut ainsi s’en prévaloir contre une décision de justice lui accordant une trop faible indemnisation.
Conciliation prud’homale et clause de non-concurrence. Cass. soc., 24 avril 2024, n°22-20.472 : Une conciliation prud’homale rédigée en des termes généraux peut couvrir la clause de non-concurrence. Dans ce cas, même s’il respecte son obligation de non-concurrence et que la clause n’a pas été levée, le salarié ne peut pas réclamer le paiement de la contrepartie financière afférente.
Salarié protégé et indemnité d’éviction. Cass. soc., 3 avril 2024, n°22-13.478 :
Le salarié protégé dont le licenciement est nul, a droit à une indemnité d’éviction, qui correspond aux salaires dont il a été privés pendant une certaine
Réglementation
➢ La loi sur le partage de la valeur du 29 novembre 2023
Pour les entreprises soumises à l’obligation de mettre en place un accord de participation (plus de 50 salariés et présence d’un DS), la loi sur le partage de la valeur du 29 novembre 2023 a créé une nouvelle obligation de négocier sur la définition de l’augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal et sur les modalités de partage de la valeur.
Mise à jour du BOSS du 19 avril 2024, entrée en vigueur le 1er mai 2024
La direction de la sécurité sociale apporte des précisions sur la PPV et notamment, le fait que, dans le cas où deux PPV sont attribuées au cours de la même année civile, deux versements peuvent avoir lieu au cours du même trimestre, dès lors que ceux-ci sont distinctement rattachés aux deux primes attribués.
Question-réponse du Gouvernement relatif au partage de la valeur en cas d’augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal du 6 juin 2024
Le « question-réponse » du Gouvernement précise les contours de cette négociation qui devait s’ouvrir avant le 30 juin 2024 pour les entreprises dotées d’un accord de participation ou d’intéressement en cours au 29 novembre 2023.